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La réforme du bac est en marche ! Tout ça pour ça ?

La réforme du bac est en marche ! Tout ça pour ça ?
Par Florence Darmon
25.01.2021

Notre article précédent rappelait la genèse de la réforme 2018 du baccalauréat : Afin, d’une part, de mieux préparer les élèves du secondaire à suivre et surtout réussir leur formation dans l’enseignement supérieur, et, d’autre part, d’accompagner ceux qui le souhaitent à opérer une entrée réussie dans la vie active, tout en allégeant le travail de correction des enseignants en fin d’année scolaire, le Ministre Jean-Michel Blanquer a initié dès 2017 une nouvelle réforme du baccalauréat, mise en œuvre en septembre 2018, pour un premier cru de « bacheliers nouvelle formule » en 2021.

Quelle organisation des enseignements et des épreuves d’évaluation sont désormais proposées aux élèves du lycée?

Pour apporter aux jeunes les connaissances indispensables pour vivre et agir dans le XXIième siècle, comprendre les enjeux sociaux et environnementaux et être plus à l’aise avec les outils numériques à disposition, les enseignements dispensés au lycée ont été remaniés de la manière suivante.

Le nouveau programme offre à chaque élève, à partir de la classe de seconde, trois types d’enseignement :

  1. Un temps de soutien et d’orientation de 2h/semaine tout au long des années de lycée : après un test numérique de positionnement en début de seconde, qui permet à chaque élève de savoir où il en est en français et en mathématiques, les professeurs se mobilisent pour apporter un soutien individuel approprié, tandis qu’une aide à l’orientation est donnée pour accompagner chacun vers ses choix en classe de première, puis de Terminale et au-delà.
  2. Un large socle de culture commune, humaniste et scientifique, ouvert aux enjeux de l’avenir : incluant des cours de français (4h en seconde, 3h en première, remplacées par 4h de philosophie en terminale), histoire géographie, deux langues vivantes, Education Physique et Sportive (EPS),  et Enseignement Moral et Civique (EMC), pour 15 à 16h/semaine chaque année, auxquels s’ajoutent des matières scientifiques: mathématiques, physique-chimie, SVT, Sciences Economiques et Sociales (SES) et Sciences Numériques et Technologiques (SNT), (11h30 h en seconde, remplacées par 2h d’enseignement scientifique/semaine en 1ère et terminale générales, et par 3h de mathématiques/semaine en 1ère et terminale technologiques). Les cours de tronc commun sont indifférenciés en seconde générale et technologique, le choix pour une filière technologique – organisée en séries, inchangées par rapport au système précédent – ou des cours de spécialités en voie générale, s’effectuant en fin de 2nde.
  3. Des disciplines de spécialité et des matières optionnelles, choisies par chaque élève et qui s’accentuent au fil des ans :  cela consiste en un choix de la série en voie technologique (avec 15 à 18h d’enseignement/semaine) ou un choix des enseignements de spécialité dans la voie générale. Trois spécialités parmi 12, de 4h chacune, peuvent être choisies en première générale, qui se restreignent à 2 choix de spécialités de 6h chacune en terminale générale. L’élève peut enfin ajouter à ces enseignements de spécialités ou séries, le choix - non obligatoire - de deux matières optionnelles, en 2nde, 1ère et terminale.

Cette nouvelle organisation des enseignements amène nombre de questions.

Pour atteindre ses objectifs de meilleure préparation à l’enseignement dans le supérieur, l’accompagnement personnalisé sera-t-il effectif pour chaque élève ? En effet cet accompagnement était déjà présent, sur le papier, dans le système précédent ; il devra donc être mené de façon pro-active auprès de chaque élève afin de le pousser à s’interroger et préparer son avenir si on veut obtenir une quelconque efficacité ! Il devra donner lieu à une production réelle, suivie par un tuteur désigné, répertoriée et évaluée, seul gage d’effectivité afin de ne pas être une n-ième tentative avortée.

Par ailleurs, on peut s’interroger sur la faible part donnée aux enseignements scientifiques obligatoires : un enseignement général de 2 heures par semaine suffit-il à appréhender la complexité du monde qui nous entoure, alors que les sciences imprègnent chaque objet que nous utilisons pour chaque action du matin au soir. Ainsi pour apprécier, ou critiquer, les choix opérés pour protéger la santé, l’environnement, l’économie d’un pays, des analyses scientifiques doivent être comprises et pas seulement commentées philosophiquement. Le simple enseignement scientifique de 2h par semaine, prévu par la réforme de 2018, donnera un vernis à nos futurs citoyens, mais assurément pas les capacités de se forger une opinion solide sur le bien-fondé de telle ou telle position politique. La pandémie tragique, que nous connaissons actuellement, met en lumière que 50 millions de nos concitoyens se posent aujourd’hui en spécialistes éclairés de ce qu’il aurait fallu faire ou ne pas faire ; cela ne tend-il pas à vouloir renforcer les acquis scientifiques des plus jeunes plutôt que d’abandonner les sciences après la seconde ?

L’évaluation est composée d’épreuves notées chacune sur 20 pour un total de 100 coefficients :

  • D’épreuves d’évaluations communes - coefficient 30 : le choix des sujets est opéré par le chef d’établissement dans une banque nationale de sujets. Les E3C se déroulent :
    • au cours du 2nd trimestre de 1ère, avec une épreuve d’histoire géographie, une de langue vivante A, une de langue vivante B, auxquelles s’ajoute une épreuve de mathématiques pour la seule voie technologique,
    • au cours du 3ème trimestre de 1ère, avec les mêmes matières qu’au 2nd trimestre, auxquelles s’ajoute une épreuve d’enseignement scientifique (voie générale uniquement) et une épreuve d’enseignement de spécialité (ou série) suivie en 1ère.
    • puis au 3ème trimestre de Terminale avec une épreuve d’histoire géographie, une de langue vivante A, une de langue vivante B, auxquelles s’ajoute une épreuve de mathématiques pour la voie technologique, et une épreuve d’enseignement scientifique pour la voie générale
  • D’épreuves finales – coefficient 60 :
    • Epreuves anticipées de français, en fin de 1ère : un écrit - coefficient 5, suivi d’un oral - coefficient 5
    • 4 épreuves de fin de terminale – coefficient 50 : 2 épreuves de spécialités (ou de série) – coefficient 16 chacune, une épreuve de philosophie et un grand oral
  • De la prise en compte des bulletins scolaires de 1ère et de terminale - coefficient 10

Il est vrai que la multiplication des épreuves notées (deuxième et troisième trimestre de 1ère), et la diversité dans leur notation (épreuve écrites et bulletins scolaires), pour chaque matière, est intéressante pour réduire le facteur chance de la note finale. Incidemment il faut toutefois souligner que le nouveau système - où la correction de sujets, qui auront pu être choisis au niveau du lycée par rapport aux enseignements effectivement dispensés et sont corrigés par les enseignants intéressés au premier chef par les résultats des élèves de leur propre lycée - introduit évidemment un biais par rapport aux épreuves terminales du bac, uniques dans leur sujet et anonymisées dans leur correction…

Par ailleurs, le nombre total d’épreuves en résultant n’a-t-il pas plutôt augmenté, ne réduisant aucunement ni le nombre de sujets à prévoir, ni le nombre de copies à corriger ? Ainsi le nombre d’épreuves réalisées au cours du 3ième trimestre de l’année scolaire (d’avril à juin) : soit 2 de français, 4 de tronc commun et une de spécialité en 1ère, et 4 en épreuves terminales, soit 11 épreuves au total à corriger pour chaque élève au 3ième trimestre, n’est-il pas tout simplement équivalent au système précédent ? Les épreuves anticipées au 3ième trimestre de première, non passées en terminale par un élève, seront bien à corriger pour les élèves bacheliers de l’année suivante, soit ceux qui sont en première la même année… Est-ce cela qu’on appelle simplification ?

Par Florence Darmon
25.01.2021